Réponse d'une petite co-propriété à Monsieur le Président de la République
Baisse des loyers ou baisse des impositions
Monsieur le Président
Vous avez cru bon tenter de masquer les effets de votre annonce de baisse des APL en lançant un appel à la baisse des loyers par les millions de propriétaires en France.
Cette méthode est regrettable et les locataires ont le droit de connaitre quelques vérités désagréables à entendre par la classe politique du pays.
Vous confondez deux situations : les zones tendues où le prix de l'immobilier est incroyablement cher et dépasse parfois les 10000Euros/m2. Là les constructions sont rares et les locations réservées à quelques privilégiés aux très hauts revenus car les propriétaires sont des investisseurs institutionnels spéculatifs : banques, assurances, fonds de pensions étrangers, milliardaires. Depuis des décennies le sort des personnes à faibles ou moyens revenus y est infernal. Pensez-vous sérieusement que votre appel à la baisse de 5 Euros sur des loyers de plusieurs milliers d'euros est sérieux et peut porter à effets ? Dans ces secteurs à Paris et quelques rares grandes villes de provinces, trouver un appartement à tarif correct est insurmontable. Ainsi la moyenne du prix de location d'un studio de 20m2 à Paris est de 850 € contre 450 € à Bordeaux et seulement 300 € dans notre résidence.
En effet dans les autres secteurs, soit l'immense partie du pays, la plupart des petits investisseurs sont confrontés à de grandes difficultés pour obtenir un gain raisonnable et générer de quoi vivre et entretenir les appartements. Cela est encore plus vrai pour ceux qui sont dans le secteur social comme nous, avec des loyers plus bas de 35% en moyenne que ceux des autres structures semblables dans les villes étudiantes. Les impayés, la multiplication de la concurrence générée par les offres fiscales et la défiscalisation pour les spéculateurs depuis 25 ans qui a mis sur le marché bien plus d'appartements qu'il n'y a de clients, les périodes d'absence de revenus locatifs de plus en plus longues en raison de la volatilité des comportements, les lois en défaveur des bayeurs qui exonèrent les locataires indélicats, l'augmentation effrayante des prix des entreprises du bâtiment dans le domaine de la réparation et de l'entretien rendent les marges inintéressantes pour les investisseurs potentiels. Plus ou peu de constructions neuves, manque de rénovation, refus de location et abandon d'immeubles sont les conséquences de cette politique déléterre. Dans beaucoup d'endroits la valeur du capital s'effondre et les immeubles sont invendables faute de rentabilité suffisante.
Mais le pire des fléaux qui pèse sur l'immobilier est la prolifération des impôts qui atteignent des sommets. Ces impôts sont partiellement répercutés sur le prix des locations. C'est le résultat de la seule recette que connaît notre administration et nos politiciens qui promettent les baisses avant d'être élus et augmentent ensuite. Par exemple, au moment où les actions, les lingots d'or, les yachts et les collections d'art sont exonérés de l'impôt sur la fortune, seuls les immeubles locatifs restent concernés ! Les milliardaires ne payerons plus mais les petits propriétaires sont déclarés riches rentiers taxables.
Monsieur le Président vous êtes trop savant pour ignorer également la différence du taux d'imposition des revenus immobiliers entre l'Allemagne et notre pays : 12% là-bas et 37% ici ! Ne cherchez pas d'autre explication : si les impôts immobiliers baissaient au même niveau qu'en Allemagne, je baisserais les loyers de beaucoup plus que 5 Euros et je ne serais pas le seul...
Enfin, avant de demander à tous les bailleurs cette baisse, sachez qu'elle a souvent été mise en place depuis des années : ainsi dans notre résidence les loyers ne sont plus réévalués depuis 4 ans soit 5% de remise et autant en moins dans le résultat d'exploitation. Cela représente en moyenne une baisse des loyers de 15 Euros par mois et locataires soit plus de 2000 euros par an en moins pour les co-propriétaires. En revanche les impôts continuent à augmenter depuis vos prises de fonction de ministre de l'économie puis de Président de la République.
Vous seriez bien inspiré de réfléchir avant de parler et de mener une politique d'harmonisation fiscale donc de baisse comparable aux Etats bien gérés.
Bien que vous ne lirez jamais ce message
recevez, Monsieur le Président, les sentiments navrés d'un tout petit propriétaire.